Une patte de dérailleur cassée au Pamir

RobinJournal de bord5 Comments

Mayan le férailleur de Murghab
Depuis Khorog, nous faisons route commune avec Florent et Eric, deux aventuriers cyclistes français super sympas. Ces derniers jours, nous étions dans la fameuse Wakhan Valley, qui nous offre un chemin de terre, sable et cailloux passant par un col à plus de 4200m d’altitude. Tout allait relativement bien malgré la difficulté jusqu’à ce que mon derailleur rencontre une pierre sur le chemin. Résultat : une pièce cassée en deux et évidemment impossible à réparer sur place.

Patte de dérailleur cassée

Patte de dérailleur cassée

C’est incroyable comme dans un voyage comme celui-ci, tout peut changer d’un instant à l’autre. Après être resté un moment abasourdi devant ma pièce cassé, il a fallu étudier les options…
1 – demander une pièce aux cyclistes sur le chemin, sachant que les pièces sont relativement uniques à chaque vélo, cela paraît peu probable.
2 – fabriquer une nouvelle pièce avec les moyens du bord à Murgab
3 – faire envoyer une pièce depuis Dushambe ou Osh
4 – attendre la famille qui nous rend visite le 9 septembre prochain, donc pas de vélo jusque là.

Trike sur taxi

Trike sur taxi

Finalement, j’ai pris un taxi pour la première prochaine ville, Murgab, plus de 200km après Firmin et Arlen. Heureusement, me voilà bien accompagné par Vélovadrouille Bébert Mimile Eric, qui en l’espace d’une seconde avait déjà pris la décision de m’accompagner et m’aider dans ce moment relativement difficile.

Wakhan Valley

Wakhan Valley

Le duo de choc : Mimile et Robin

Le duo de choc : Mimile et Robin

Depuis deux jours, nous sommes donc arrivé à Murgab, ville composée de containers posés à plus de 3600 mètres d’altitude, sur un sol presque lunaire.

Le marché container de Murghab

Le marché de Murghab : deux lignes de containers

Habitants de Murghab

Des kirghizes, qui représentent les 3/4 de la population de Murghab

Des le premier jour, nous allons chez Mayan, le seul ferrailleur de la ville. Très vite, il comprend le problème. Ça va être difficile, la pièce est très fine et très usinée. Il va falloir en fabriquer une autre…

Devant chez Mayan le ferrailleur

Devant chez Mayan le ferrailleur

Équipé d’un poste de soudure et d’une disqueuse comme seuls outils, il a du utiliser ses mains de magiciens de la débrouille pour fabriquer une pièce similaire. Utilisant un vieux groupe générateur comme source d’électricité, sachant que la ville est en coupure d’électricité depuis 2 ans !

Mayan le férailleur de Murghab

Mayan le férailleur de Murghab

Il a fallu un jour pour réunir les pièces, trouver les filetages correspondants au derailleur dans le bazar qui comporte que des pièces chinoises… Bref, les problèmes étaient nombreux. Mayan, lui, était serein du début jusqu’à la fin, le visage détendu et les gestes précis, il contournait les problèmes avec ingéniosité.

Vieille patte et nouvelle patte

Vieille patte et nouvelle patte

La nuit tombant, Mayan nous propose de manger avec sa famille, ses 2 fils et 2 filles ainsi qu’un ami de la famille. Nous entendons le ronron puissant du vieux groupe générateur dehors qui nous permet d’allumer la seule lumière de la maison. Nous sommes assis autour du festin du soir ; du riz aux légumes que nous partageons tous dans la même assiette. Les deux filles et deux fils sont à l’image du père, serviables, aimables, calmes.

Un repas offert avec le coeur

Un repas offert avec le coeur

Avec les enfants de Mayan

Avec les enfants de Mayan

Après plus d’une heure passés dans ce climat apaisant, nous rentrons avec Eric à notre guesthouse avec cette belle expérience dans la tête. L’air est frais la nuit à cette altitude et la noirceur de la ville nous offre un spectacle magique avec un ciel composé d’étoiles innombrables. Le rendez-vous du lendemain est donné : 7h30 chez Mayan.

Le lendemain, c’est avec plein d’entrain que l’on se lève, étant si prêt du but avec cette petite pièce qui est maîtresse de la suite de mon voyage…

Un coup de disqueuse

Un coup de disqueuse

Roulements de tambour, je visse délicatement la pièce. Rien ne résiste, les éléments de combinent avec perfection. Je monte sur ma machine et donne quelques coups de pédale avec délicatesse. Cela semble tenir !

Enfin Mayan peut tester le trike

Enfin Mayan peut tester le trike

Je laisse Mayan tester le trike, j’adore le voir sourire en roulant sur cette étrange bestiole à 3 roues. Nous avons découvert le matin même en discutant avec la patronne de notre guesthouse que Mayan a perdu sa femme l’année précédente, faute de soins suffisants à Murgab. Il s’occupe désormais seul de ses 4 enfants, qui doivent tous avoir entre 4 et 12 ans tout en effectuant son travail de ferrailleur. En apprenant ça, cela ne fait qu’amplifier mon respect et admiration envers le personnage.

Je ne le remercierais jamais assez pour son travail effectué, mais surtout pour son amabilité et sagesse transmise uniquement par ses faits et gestes, à défaut de pouvoir échanger par la langue.

Photo de famille

Photo de famille

Même les enfants peuvent tester le trike

Même les enfants peuvent tester le trike

Cet après-midi, Eric et moi allons reprendre la route en contre-sens, dans l’idée de faire une surprise à Firmin, Arlen et Florent qui sont derrière nous. Je croise les doigts pour que la pièce tienne le coup. Finalement, je retire de grandes leçons de vie de cette mésaventure : – avec Eric, qui m’a soutenu et accompagné, en laissant de côté la magnifique route du Pamir (qui est sans doute une des plus belles et renommée de l’aventure) sans hésitation. Il m’a dit que pour lui, l’aventure basée sur le partage et les relations humaines étaient ses moteurs et qu’il aimerait donner autant qu’il a reçu sur sa route. C’est réussi… Merci !
– avec Mayan, qui n’a jamais abandonné, que ce soit dans sa propre vie, ou dans son travail, qu’il a effectué sans jamais exprimer l’ombre d’un doute.

Auteur

Robin

Passionné par le vélo et l'aventure, amoureux de la nature et de la technologie.

5 Comments on “Une patte de dérailleur cassée au Pamir”

  1. Pingback: Murghab, une ville qui a perdu l'électricité | Hello Bike World

  2. Pingback: Pamir, mon beau Pamir. | Hello Bike World

  3. respect et admiration ce sont bien les mots qui conviennent à Maya . très belle figure humaine inoubliable

  4. Vendredi 25/08 Rémi et Sylvie:
    Une nouvelle fois, tu nous fais partager tes aventures et nous avons tremblé avec toi à cette nouvelle péripétie, Rebondir semble donc une nouvelle fois la solution avec énergie, inventivité et fraternité.
    Ton sourires ne semble pas te quitter; voilà probablement la raison qui donne à tes interlocuteurs l’envie de t’aider. Je m’interroge à ce qui passera quand tu rencontreras une fille au sourire aussi ravageur !
    Bien cher neveux, puisse ces quelques mots de te donner un peu d’énergie pour la suite de cette belle aventure. R&S

  5. Merci Robin pour ce très beau récit… c’est comme si on avait vécu cette belle histoire à tes côtés… Bonne suite en espérant que vous pouvez continuer votre route pour un moment sans problème de matériel…. Bise à vous 3. Annette et Marie depuis l’Irlande où nous passons nos vacances (avec la tente !!)

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