1. La décision
2400 mètres de montée sur 25 kilomètres. Voilà ce qui nous attend aujourd’hui. Et en haut, il faudra traverser la fameuse « Mer de Sable ». Sable et vélo/trike ne font pas bon ménage, et quand on demande aux gens autour de nous si c’est possible de la traverser à vélo, on obtient une réponse et son contraire. De source sûre cependant, ce n’est pas la bonne période pour la traverser car il n’a pas plu depuis longtemps et le sable est assez profond, trop pour mes petites roues de 20 pouces pas assez larges pour flotter au dessus de la cendre.
Il faut prendre une décision.
Grâce à Zhuyyin et Henry de Malang, la solution se dessine. On prendra finalement un pick-up pour monter et traverser la Mer de Sable. Ce n’est jamais une décision facile car ce n’est pas l’idée du voyage d’utiliser des moyens motorisés, mais nous sommes un peu pressés par le temps (Nos parents arrivent le 23 avril à Bali !) et nous ne voudrions pas être coincés dans le sable. C’est quand même plus de 10 kilomètres, il faudrait une après-midi complète pour pousser les vélos là-dedans.
C’est donc à la fois très heureux et déçus de ne pas vaincre le col par la force de nos jambes que nous gravissons le sommet en voiture. À l’arrière du pick-up avec les vélos, en croisant les véhicules en sens inverse à 2mm et en franchissant les montées à plus de 20% comme si de rien n’était, le tout à une vitesse dépassant largement mon envie d’adrénaline du moment.
Nous payons l’entrée du parc, 220K IDR par personne (16$). La voici, la Mer de Sable ! Effectivement, difficile de la traverser à vélo en ce moment, et complètement impossible en trike. Nous sommes finalement très heureux de notre décision, qui nous est revenue à 700K IDR, soit environ 50$ pour passer le col de Malang à Cemoro Lawang.
Nous descendons les vélos du pick-up, faisons nos adieux à Zhuyyin, Henry, notre chauffeur et son ami dont les noms m’échappent.
Merci à eux pour nous avoir aidé à trouver cette très bonne solution avec un véhicule adapté, je n’ai même pas dû démonter et plier mon trike !
2. Le lever de soleil et le coucher des touristes fatigués
Nous allons chercher quelques provisions (des piseng goreng = bananes frites et autres fritures des plus grasses) au boui-boui de la mamie du village, 2000 IDR pièce (soit 0.15 $), posons les vélos devant l’office d’entrée du parc du Bromo qui a l’air suffisamment sécurisé, malgré l’attroupement constant autour de mon trike. Nous prenons quelques affaires chaudes, le matériel de couchage et la tente et c’est parti pour l’excursion du soir. Nous allons poser la tente au point d’observation du lever de soleil pour être aux premières loges de ce spectacle le lendemain matin.
Après une heure de marche, nous arrivons à destination. Il n’y a personne en haut sur le point de vue, nous mettons la tente sous un petit abri et admirons le coucher de soleil. Nous sommes tellement agréablement surpris d’être les seuls à avoir eu cette idée ! Le coucher de soleil est déjà incroyablement beau.
À 17h30 il fait déjà nuit, nous nous endormons vers les 19h30.
Vers 22h30, nous sommes réveillés par des bruits de pas et des éclats de voix, nous ne sommes plus seuls ! Des touristes accompagnés de leur guide viennent d’arriver pour à leur tour monter leur campement, seulement 2 tentes.
Vers 3h00 du matin, d’autres touristes arrivent, sans tente cette fois. Le lever de soleil est prévu pour 5h20 ce matin… Ces touristes vont donc devoir attendre plus de 2h dans le froid (il doit faire moins de 10ºC). Nous n’avons pourtant aucune pitié pour eux car ils ont rompu notre sommeil sacré. Mon sac de couchage, température de confort 20ºC, est à sa limite et je tremble un peu de froid.
On arrive à se rendormir jusqu’à 5h environ. Au réveil, nous entendons un brouhaha digne des fosses de festival avant un concert ! Nous sommes au beau milieu d’une foule de touristes prêt à ne pas « rater » le lever de soleil. Nous plions les affaires mollement après cette relativement bonne nuit de sommeil…
Nous ouvrons la fermeture de la tente, les couleurs mauves-orangées commencent à apparaître.
Nous découvrons avec amusement une vingtaine de personnes perchées au dessus de notre tente, accompagnées de trépieds et appareils photos aux objectifs protubérants. Ils doivent être là depuis plus de 2h ceux là ! Pendant que l’on dormait paisiblement juste en dessous.
Nous voyons aussi devant nous les touristes frigorifiés et tombant de fatigue prendre une, deux, trois photos puis déjà redescendre, en traînant un peu les pieds. Ils ont du se lever tôt les bougres, facilement à 1h ou 2h ! Et c’est pas fini pour eux car ils vont bientôt reprendre un véhicule pour enchaîner avec le volcan Ijen avec une randonnée dans la nuit. Qui a dit que les tours organisés permettaient de voyager relax ?
On comprend toutefois l’intérêt de la chose. Il est beau le Bromo (et ses collègues Batok et Cemuru) avec ces couleurs matinales.
Après avoir démonté le camp et mitraillé le Bromo, nous descendons gaiement, en joyeuse compagnie de Pauline, Naomi, (deux compatriotes suisses !) et de Camille (de la France voisine) avec qui nous échangeons nos impressions sur le voyage, la peur de l’inconnu, le tourisme…de masse, entre autres ! Il n’est que 8h et dans notre tête, c’est comme si c’était le milieu de la journée déjà.
3. Allons faire les fous dans le sable
Un étudiant nous avait proposé la veille ses deux motos bidouillées lui-même pour aller voir le cratère et se balader autour de la mer de sable. Pour 300K IDR (20$), nous avons 2 motos pour la journée. Il s’agit d’un scooter standard et d’une petite moto/mobylette au pot sur-dimensionné, qu’on entend à 3 km à la ronde environ. Je vais donc devenir aujourd’hui une des personnes que je méprise le plus… Elle peut faire du 150 km/h selon son concepteur. N’ayant pas de casque, je ne vais pas vérifier ses dires… C’est bien beau de pouvoir aller à 150 km/h, déjà il faut arriver à la faire démarrer et ne pas caler car elle est très capricieuse !
C’est parti, nous voilà sur le sable glissant ! On s’amuse comme des petits fous entre les dunes et les plats infinis.
4. Le cratère
Nous posons enfin les motos au parking avant l’ultime marche jusqu’au cratère du Bromo. Nous payons les 5’000 roupies du parking (même si on aurait pu simplement poser les motos en dehors du parking… On réalise souvent trop tard ce genre d’erreur). J’ai réussi à oublier la clé sur le contact… Finalement, j’étais bien content que ma « précieuse » bécane soit à peu près surveillée.
Tels des dieux montant vers le Mont Olympe (oui, ça va bien l’égo), nous montons une à une les marches interminables vers le cratère.
On sent l’odeur du soufre mais rien qui nécessite l’achat du masque qu’on essaye désespérément de vous vendre un peu partout. Je craque cependant pour « l’offrande » à jeter dans le cratère mais principalement parce que le vendeur à gravi toutes les marches avec nous, en discutant aimablement. Ce qui changeait d’un autre qui essayait de m’attirer en me sifflant comme un chien.
Quelques « prières » prononcées avec Kilian pour fêter nos retrouvailles, ce que nous avons accomplis et ce que nous allons accomplir. Nous jetons simultanément notre bouquet de fleurs qui volent vers le cratère élégamment… et qui s’écrasent lamentablement sur le pan du cratère en rejoignant les autres offrandes en train de se décomposer gentiment.
Je m’attarde alors sur le fond du cratère. On peut voir le lac bouillonnant d’une couleur vert pistache. On ne voudrait pas vraiment s’y baigner mais la couleur est tout à fait tape à l’oeil.
J’observe autour de moi, le désert, la roche, la nature… Je me sens tellement bien dans cet environnement et surtout tellement mieux que dans les centres des grandes villes… Les hordes démoniaques de Jeeps des tours organisés sont déjà parties en direction d’un autre volcan, en suivant à la minute près le planning complètement dingue du tour des volcans connus de Java (Package Bromo + Ijen Kowa en 24h, vive le tourisme !).
5. La nuit polluée
On rend les motos en milieu d’après-midi. Le scooter de Kilian n’a plus la clé sur le contact. Oui, je ne l’ai pas raconté mais elle n’arrêtait pas de tomber, et ce, même avec le scooter démarré ! J’avais déjà dû faire une mission de recherche plus tôt dans la journée, qui s’est heureusement avérée fructueuse !
Kilian repart dans le désert pour retrouver la clé. Je l’attends en mangeant un petit Bakso (une bonne soupe avec des boulettes de viande, tofu et quelques nouilles). Je ne sais pas pourquoi mais je sais qu’il va la retrouver, même s’il y a presque plus de chances de trouver une aiguille dans une botte de paille qu’une clé dans un désert de sable. Ça n’a pas manqué. 20 minutes plus tard, Kilian revient l’air victorieux.
On récupère les vélos, et allons poser notre tente dans le lieu de camping « officiel » du village, derrière le Lawa Village. Il s’agit d’une sorte de terrain de foot. En tout cas, il y a un but penché fabriqué en bambou. Personne et presque le silence. Fidèles à nos habitudes, on tombe de sommeil à 19h.
« VrrrRRRRRouUUUUUmmmmm ! »
Dès 4h, les moteurs rugissants de la horde de Jeeps nous sortent du sommeil réconfortant. Je peux vous dire qu’il y a mieux comme réveil.
A 4h30, la situation s’aggrave car notre lieu de camping se transforme en parking ! La tente s’enfume des pots d’échappements et les chauffeurs n’hésitent pas une seconde en se garant à 2 cm de la tente… Bref, pour le sommeil, on reviendra. (Ou pas !)
Je profite de ce paragraphe pour une petite réflexion sur ce type de tourisme… Tout est dans l’excès. Et tout va vite. Les hordes de touristes arrivent dans la nuit et repartent TOUS entre 9h et 12h. Dans le village, le matin, c’est deux colonnes ininterrompues de véhicules qui occupent la route et polluent l’air de leur diesel non filtré.
L’après-midi, il n’y a absolument plus personne et les commerçants se tournent les pouces. Les ravages de ce type de tourisme, eux, restent : des plastiques et emballages sur les parkings et lieux d’amassement touristique. Point positif : il y a de nombreuses poubelles dans la ville avec un tri sélectif. Point négatif de ce point positif : j’ai regardé par la fente d’une des poubelles, le soit disant tri finit dans une seule grande benne. Déception…
J’écris d’ailleurs cet article dans un café juste à côté de la route attendant que la file de jeeps s’estompe avant de repartir vers Probollingo, au bord de la mer. Cela fait environ 2h que ça dure.
Malgré tout, quel bon bol d’air frais ce Bromo (avec une touche de diesel) !
6. Conclusion : Venez quand même, ça vaut le coup !
Je ne veux pas vous décourager de découvrir ce magnifique endroit mais peut-être est-ce mieux d’étudier des moyens alternatifs de venir ici, en transports en commun par exemple. Et surtout venez en autonomie ! Il n’y a aucun intérêt à se trouver dans un convoi de Jeeps au milieu de cette mer de sable, de faire la même chose que tout le monde en même temps, sachant qu’une heure plus tard, il n’y aura plus personne !
Le lever de soleil vaut le coup, mais le point de vue est à une heure environ du village et cela ne sert à rien de venir trop tôt ! Vous n’aurez pas meilleure vue que les autres et les belles couleurs arrivent progressivement de toute façon.
L’entrée payante se situe dans Cemoro Lawang, mais après la jonction qui va vers les points de vue. Si vous voulez uniquement observer les volcans sans s’aventurer dans la mer de sable et sur le cratère, vous n’avez pas besoin de payer l’entrée du parc. Il existe aussi un moyen d’éviter de payer l’entrée du parc en suivant un petit chemin vers la Mer de Sable. Cela se fait uniquement à pied.
J’espère que j’aurai quand même réussi à vous donner l’envie de venir visiter cet endroit magique, qui vaut le coup d’être visité , à son rythme !
One Comment on “Indonésie – Les aventures au volcan Bromo”
Ca donne une idée de ce qui nous attend…? que de sensations fortes et inattendues
Magnifiques clichés dégradés de soleil… et commentaires très très pertinents …
J’adore le coup de la clé et Kilian qui la retrouve ;-))