Tout a commencé lorsque Firmin, Arlen, Kilian (mon frère) et moi-même, Robin, avons décidé de prendre le taxi afin d’éviter la pluie ainsi que les quelques 20 minutes de marche prévues. Cela aurait pu être une histoire banale si nous n’avions pas oublié un sac plastique dans le coffre en sortant…
Le sac plastique
Kilian est venu à Istanbul du 4 au 9 juin pour visiter la ville et surtout rendre visite à son cher frère (moi !). Avec l’équipe d’Hello Bike World, nous avions donc prévu de profiter de son retour en Suisse pour lui donner les affaires dont nous n’avions plus besoin, c’est à dire des vêtements chauds ainsi que quelques appareils électroniques et câbles qui nous encombraient plus que nous aidaient.
Nous mettons donc ce 9 juin tout ce matériel dans un sac plastique blanc.
Le taxi
Premier jour de pluie à Istanbul ! Nous n’avons pas beaucoup de chance puisque c’est le jour où nous quittons notre auberge « Second Home » qui se trouve près des quartiers touristiques d’Istanbul (Sultan Ahmet, Sainte Sophie, Grand Bazar…) pour aller chez nos hôtes Can et Dicle, qu’on a trouvé sur le service Warmshowers.
Nous avons tous au moins deux sacs. Arlen, en particulier, est en charge de son sac ainsi que du fameux sac plastique blanc. Il est 19h quand nous quittons Sultanhamet, soit un quartier du coté européen de la ville, pour Kadikoy, du coté asiatique.
Nous prenons le métro pour traverser le Bosphore. Il nous reste alors environ 1.4 km à parcourir pour arriver à notre destination. La pluie s’accentuant, nous décidons de prendre un taxi. A coté du centre commercial, nous montons dans le premier taxi qui attend.
La perte
Bon, déjà, l’idée de prendre le taxi était finalement très mauvaise car nous avons été bloqué dans les embouteillages dans absolument toutes les rues… Après une demi-heure à rouler à 3km/h de moyenne (soit une distance de 1.5km, oui, oui), nous arrivons près de l’immeuble où habitent nos hôtes, à coté d’un grand stade.
On s’arrête sur la bande d’arrêt réservée aux taxis et bus le long du stade. Vite, on sort du coffre nos affaires, chacun s’active à prendre ses affaires et on referme le coffre. Allez, plus que 100 mètres avant d’enfin atteindre l’immeuble de nos hôtes.
– Quelqu’un a pris le sac blanc dans le coffre du taxi ? nous demande Arlen.
– Meeeerde !
On retourne à l’endroit où nous avons quitté le taxi, il est déjà reparti avec pratiquement toutes nos chances de le retrouver sachant que nous n’avons absolument aucune information sur celui-ci. On note l’heure : 20h00. Nous sommes le vendredi 9 juin.
L’investigation commence
Aucune information, vraiment ? Nous avons une photo de l’intérieur du taxi prise par Arlen qui était sur la banquette arrière. On voit le coté du visage de notre chauffeur et le seul autre signe distinctif est un pendentif sent-bon accroché au rétroviseur central. Bref… on va pas aller loin avec ça.
Le soir même, nous décidons d’aller à l’endroit où nous avons pris le taxi dans l’espoir que nous retombons sur ledit taxi. Autant dire une aiguille dans une botte de foin sachant qu’il y a plus de quinze mille taxis à Istanbul.
Évidemment, notre taxi n’est pas là. Nous montrons la photo aux quelques chauffeurs présents. Ils ne le connaissent pas. Le taxi que nous avons pris n’est pas du coin.
Caméra de surveillance
Le lendemain, nous trouvons deux caméras de surveillance au niveau du stade de football. En étudiant le type de caméra utilisé, on découvre que ce sont sûrement des caméras de la police.
Nous allons donc Firmin et moi-même au poste de police principal qui se situe près du port de Kadikoy. Évidemment, personne ne parle anglais… Heureusement, Can, notre hôte, explique la situation au téléphone à un policier qui visiblement n’a rien à carrer de notre problème. Voyant notre insistance et après une vingtaine de minutes à poireauter, il nous emmène dans la salle de surveillance où seule une personne est admise. Firmin rentre donc seul dans la salle.
Il ressort une dizaine de minutes après. Apparemment, la caméra ne leur appartient pas, c’est celle du stade. Nous rentrons bredouille du poste de police et décidons d’aller illico presto au stade. Nous expliquons tant bien que mal notre problème au gardien du parking souterrain qui nous indique que la seule solution est d’obtenir l’autorisation de la police.
Nous ne voulons pas retourner au même poste de police après s’être fait mal accueillir la première fois. Nous choisissons un petit poste de police juste à côté du stade. On ré-explique le problème en utilisant Google Traduction ( qui traduit 1 fois sur 2 ce que l’on veut). L’image suivante est un exemple d’une mauvaise traduction, on essayait de traduire « yuzde » qui était un mot sur une addition d’un restaurant.
En vrai, « yuzde » signifie « pourcentage ». Google Traduction donne « Dans la face » (qui est un peu vrai quand on découvre qu’on doit payer 20 lires de plus sur l’addition). Mais du coup, on a un peu peur de vexer inutilement les personnes que l’on rencontre avec Google Traduction qui pourrait les insulter sans le vouloir.
On parle avec un intermédiaire au téléphone qui parle très approximativement l’anglais. Bref, ce n’est toujours pas gagné. Après quelques temps, les deux policiers du poste nous indiquent de les suivre. Victoire ! Ils vont pouvoir nous accompagner au stade et demander les images pour nous. C’est ce que nous pensions. Ils partent en moto et nous font monter dans un taxi. On comprend bien vite ce qu’il se passe… le taxi nous amène directement au poste de police ou nous étions le matin même… Nous affrontons donc le chef de la brigade à l’air narquois pour la seconde fois.
« Nous avons besoin d’un papier d’un autorisation de votre part, s’il vous plaît. »
Il nous sort un post-it.
« Un papier ? » nous dit-il, très fier de sa blague.
Je regarde Firmin, qui est à 2 doigts de la crise de nerf. Nous ne rions absolument pas. Finalement il ordonne à un autre policier d’écrire pour nous l’autorisation. Une fois effectué, reste à obtenir la signature du chef… Nous lui tendons le papier. Il prend son stylo, marque une pause, me regarde comme si je devais le supplier pour qu’il signe. Je ne bronche pas, j’attends. Il signe, nous disons « merci beaucoup » en pensant intérieurement « merci gros con » puis nous partons. Petite victoire.
Nous retournons au stade pour la seconde fois. Nous ré-expliquons notre histoire à un second gardien de parking car le premier a sûrement fini sa journée… Il nous dit simplement qu’il faudra revenir lundi, soit deux jours après, car c’est le week end.
Lundi
Nous allons au stade lundi matin, cette fois directement au QG de la sécurité. Nous expliquons évidemment une nouvelle fois notre histoire et le pourquoi du comment avec notre superbe lettre de la part de la police. Nous pouvons apercevoir derrière le bureau l’écran de surveillance où l’on voit en direct les caméras de surveillance. Elles sont de très bonne qualité et nous avons toutes nos chances de pouvoir lire la plaque d’immatriculation.
Oui… sauf que nous n’avons pas le droit de visualiser quoi que ce soit. La sécurité doit envoyer les fichiers au poste de police… Il faudra y aller le même après-midi pour les résultats. Très bien. L’après-midi, nous allons donc voir les résultats de l’enquête à la police. Sauf que la personne en charge des caméras n’est pas là… »Revenez demain ! »
Mardi matin
Nous allons faire la demande de visa ouzbek et Arlen et moi-même devons effectuer le rappel des vaccins de la rage et hépatite (une autre aventure en soi). Firmin en profite pour aller seul à la police pour voir les résultats. Cette fois, le chef de la police dit qu’il n’a rien reçu et que de toute façon, il valait mieux qu’on arrête tout car il n’y avait aucune chance qu’on retrouve quoi que ce soit.
Firmin retourne donc au stade pour demander ce qu’il en est. Ils ont bien envoyé les images au poste de police, ils griffonnent un nom sur un bout de papier, c’est la personne de la police qui a reçu les images.
Mardi après-midi
Firmin m’envoie la photo du bout de papier avec le nom du gars qui doit avoir reçu les images. Arlen et moi-même retournons donc au poste de police pour affronter une nouvelle fois le chef de la police.
« Nous voulons parler à xxxx »
Il baragouine quelques mots en Turkish-English.
Finalement, nous abandonnons avec lui et tentons de parler à un de ses collègues. Il nous dit que le nom écrit sur le papier n’est pas complet. Il n’y a que le nom de famille et le statut…
Nous insistons un peu mais rien à faire, nous sommes face à un mur. Ils n’ont rien reçu apparement et ne sont au courant de rien. On part. Je suis énervé. On a déjà perdu quatre jours. Dans le dernier espoir, nous retournons au stade avec Arlen et nous leur demandons simplement de nous montrer les images de la caméra de surveillance, en leur disant qu’on a essayé avec la police mais que c’est une impasse.
Le chef de la sécurité à l’air plutôt sympathique et semble comprendre la situation. Il nous montre soudainement une photo de son iPhone. Une photo pixelisée d’un écran qui montre la plaque d’immatriculation du taxi. C’est difficile de lire le numéro mais nous avons quelque chose ! Il nous donne même un DVD avec la vidéo de la caméra de surveillance. Incroyable !
Nous rentrons victorieux. Maintenant il faut trouver à qui appartient ce taxi.
La plaque d’immatriculation
34 TAA 57. Nous avons la plaque mais impossible de savoir à quelle compagnie de taxi elle appartient. Si près du but… nous devons partir le lendemain. C’est la fin, c’est une impasse. L’enquête est terminée. Nous sortons quand même pour un dernier restaurant avec nos hôtes. Nous retrouvons Dicle à l’arrêt de bus principal. Dans un ultime espoir, nous partons demander aux quelques taxis présents s’ils ne connaissent pas la plaque ou quel est le moyen de découvrir la compagnie de taxi…
Je remarque qu’un taxi possède presque la même plaque d’immatriculation, sauf que c’est 34 TAA 67 et pas 34 TAA 57.
Et pourtant, en regardant plus près, on remarque que le taxi a le même sent-bon accroché au rétroviseur. Aucun doute possible, c’est le même taxi ! On se penche à la fenêtre en dévisageant le chauffeur.
C’est lui ! On s’était trompé d’un chiffre en lisant la plaque sur la photo.
On lui demande ce qu’il a fait de notre sac. Il nous répond qu’il n’a pas vu de sac mais que peut-être que le sac a été récupéré dans l’agence de taxi. On monte dans le taxi pour rejoindre l’agence. Je vous laisse imaginer l’excitation d’avoir retrouvé par hasard LE taxi parmi les 15’000 présents à Istanbul. Nous savons que nous ne sommes plus très loin de notre sac, s’il existe encore…
Nous arrivons à l’agence de taxi.
Malheureusement… pas de sac ! Mais apparemment, un des chauffeurs de taxi a emmené le sac chez lui, il s’appelle Békkir, il sera là le lendemain matin.
Mercredi
Le matin, nous retournons en bus à l’agence. Nous demandons un « Békkir ». Le certain Békkir se montre. Il comprend ce qu’il doit faire sans que l’on ait à expliquer la situation. Il part chez lui. Nous attendons quelques minutes. Et il revient avec le sac.
Nous regardons dedans : TOUT est là ! VICTOIRE TOTALE !
Enfin…pas vraiment parce que Kilian est déjà reparti donc impossible de faire revenir nos affaires en Suisse. On se retrouve donc avec un sac rempli d’affaires inutiles à Istanbul, mais ça c’est une autre histoire.
2 Comments on “Un sac perdu à Istanbul”
Mais qu’est-ce qu’il y avait de si important dans ce sac qui ne mérite de continuer le voyage avec vous? LOL!
Vraiment les gars…
La chance est avec vous et je crois aux coïncidences pas au hasard….
Super récit épique qui m’a fait sourire et rire tout le temps de la lecture!
Vous n’avez pas dû rire tout le temps je me doute bien… mais c’est une expérience unique (quoique le drone c’était aussi ça!) et vous allez pouvoir vous recycler en enquêteurs vidéo-reportage…
Quelle persistance en tout cas!