Anecdotes animalières.

FirminJournal de bord1 Comment

Tortue

Ce voyage, s’il n’égale pas certaines de mes précédentes expéditions africaines en terme de faune, nous réserve quand même parfois de belles surprises. Allez, cadeau, je vous partage trois petites anecdotes animalières !

Après près d’un mois au bord du Danube, nous quittons définitivement le fleuve et ses rives délicieusement plates pour nous attaquer aux collines bulgares.
Le contraste est sans équivoque. Autant les routes roumaines nous régalaient de leur revêtement impeccable, autant ici, nos pauvres vélos subissent une véritable séance de torture : les routes principales sont parsemées de trous qu’il n’est pas toujours évident de repérer à vélo, surtout lorsqu’on n’ouvre pas la marche. Les routes secondaires ne sont quant à elles carrément pas goudronnées, et les tranquilles échappées rectilignes se transforment en véritable bataille de boue et d’eau peu ragoûtante.
Sur une de ces routes massacrées, alors que je rêvasse tranquillement en évitant machinalement les trous – que dis-je, les crevasses ! -, j’aperçois soudain une longue forme brillante et tortillante juste sous mon pédalier. À peine le temps de comprendre qu’il s’agit d’un serpent et de planter les freins que ma roue arrière vient écraser le pauvre reptile d’un mètre de long (ou plutôt 2 x 50 cm à présent), qui ne demandait certainement qu’à traverser la route. Arlen, qui roule trois mètres devant moi, a donc dû l’éviter de justesse sans s’en rendre compte.
Cet épisode malheureux me rappelle que nous roulons depuis 2 mois sans aucune protection en cas de morsure de serpent ou de piqûre de scorpion. Il serait donc sage d’y remédier, en ajoutant l’aspi-venin sur la liste des courses à faire à notre arrivée à Istanbul, dans moins de deux semaines, ou du moins en se renseignant sur la procédure à adopter en cas de morsure. D’ici là, on tentera de regarder où on met les pieds !

Le lendemain, ça continue avec les joies zoologiques. Depuis une semaine, nous ne cessons de croiser des charrettes tirées par des chevaux. Les chevaux ont souvent des comportements peu prévisibles lorsqu’ils sont confrontés à des objets qu’ils ne connaissent pas. Bien évidemment, un trike au toit jaune fluo, ça ne se croise pas tous les jours. Si la plupart des chevaux croisés jusqu’à ce jour n’ont signifié leur étonnement qu’au moyen d’un petit rictus de la tête, l’équidé d’aujourd’hui est un peu plus expressif. Alors que nous arrivons à sa hauteur sur le côté opposé de la route, le cheval se cabre brusquement, et s’emballe au point de partir au galop et traverser la double voie en nous coupant la route. A l’arrière, installée dans la carriole chargée de légumes, la petite famille de roumains tente de calmer le cheval qui n’en a visiblement pas fini de piquer sa crise. En effet, après avoir traversé le bas côté, il quitte le bitume pour s’enfoncer dans un champ à peine labouré, ce qui ne manque pas de faire paniquer le petit de la bande qui commence à pleurer, alors que sa grand-mère tente de le rassurer. Une fois le cheval enfin apaisé grâce au sang-froid du père de famille, nous nous adressons à eux pour nous assurer que l’épisode n’a été qu’une grosse frayeur, sans bobo. C’est le cas, dieu merci ! À part le petit qui ne semble pas encore s’en être remis, ils semblent même prendre cette petite embardée avec le sourire, ce qui nous permet de repartir l’esprit tranquille, non sans faire le point sur ce qu’il vient de se passer pour en tirer les conclusions nécessaires : dorénavant, sachant que nous sommes de véritables ovnis pour les chevaux, nous ne les croiserons qu’à vitesse très réduite, et les doublerons en laissant le plus d’espace possible. Ça évitera les mauvaises surprises.

Notre troisième petite rencontre étonnante prend place quelques semaines plus tard, alors que nous laissons gentiment l’Europe derrière nous. Sur la grosse route goudronnée que nous sillonnons depuis plusieurs jours déjà, nous apercevons une tortue recroquevillée dans sa carapace, en plein milieu de la chaussée. Elle est d’une sacrée taille et devait être en train d’entreprendre une traversée périlleuse de la route avant de se faire surprendre par les trois terribles cyclistes que nous sommes.

Dans un élan logique de compassion, je m’arrête, délaisse mon vélo et m’empare du pauvre reptile voué probablement à finir sous les roues d’un camion, à ce rythme. Ne sentant plus le goudron sous elle, la tortue décide de sortir de sa carapace pour se débattre en remuant les quatre pattes et en donnant des coups de tête à droite et à gauche. C’est à ce moment que je remarque trois énormes tiques, solidement ancrées sur le haut de sa tête. C’est d’une immondicité sans commune mesure, la pauvre devrait dorénavant cohabiter avec ces horreurs sans action de notre part. Arlen s’empare donc de mon Leatherman et s’attelle à la délicate extraction de la première tique, alors que je tiens fermement la tortue qui, forcément, ne devrait pas prendre ça pour une partie de plaisir. La première extraction est un petit carnage, la tortue se débattant et la tique se déchirant en deux sous les pinces du couteau. La tortue se met à saigner de la tête, ce qui m’oblige à vider le fond de ma bouteille d’eau dessus afin de nettoyer la plaie. Les deux autres tiques s’enlèvent beaucoup plus proprement, grâce à un mouvement de torsion permettant de les extraire en entier. Une fois ceci fait, nous replaçons la torture sur le bord opposé de la route, et celle-ci disparaît dans les hautes herbes sans demander son reste. Nous reprenons alors tranquillement notre chemin, un sentiment de satisfaction nous accompagnant, mêlé à un malaise évident à l’idée d’avoir fait saigner la pauvre bête. Mais probablement qu’elle doit se sentir mieux à présent, sans ces horrifiantes bestioles attelées à lui pomper tout le sang de sa tête.

Allez, va, petite tortue ! Va t’éclater dans les hautes herbes, et surtout… ne compte plus traverser ce genre d’axes routiers, tu ne trouveras pas toujours de gentils cyclistes pour te sortir de là !

Auteur

Firmin

Ingénieur de 26, je ne suis pas uniquement passionné par les watts et la technologie. Ecriture, musique, voyages et sushis font partie des choses qui me parlent, entre autres.

One Comment on “Anecdotes animalières.”

Laisser un commentaire